Michael Connelly est aussi sérieux que Harry Bosch

Michael Connelly était au Forum des images, à Paris, pour présenter sa série télé Bosch, adaptée de son personnage emblématique. L’écrivain s’avère trop sérieux pour son propre bien et aime jouer de quelques traits qu’il a donnés à Harry.

Dans le pilote, vous demandez un véritable acte de foi à ceux qui ne connaissent pas Harry Bosch. Il est accusé de meurtre et clame la légitime défense mais à aucun moment, il est prouvé qu’il est innocent. Vous ne pensez pas perdre dès le début les téléspectateurs qui vont penser que c’est un flic pourri ?

On a longtemps débattu pour savoir si on devait ou non prouver en images son innocence mais on a préféré garder le mystère. On laisse au téléspectateur le choix de juger Harry sur un seul acte mais s’ils regardent la série, ils voient son dévouement, son acharnement et au final son équité qui prouvent qu’il ne peut avoir assassiné cet homme. C’est subtil mais c’est ce que j’aime.

Comment avez-vous choisi les livres à adapter pour la saison 1 ?

On en a pris trois qui nous font découvrir Harry. La Blonde en béton montre Harry dans une salle d’audience obligé de parler de sa mère prostituée. Vous ne pourriez pas avoir Harry discuter de ça dans une conversation quelconque, ce n’est pas son genre, c’est un type secret. Dans Wonderland Avenue, la victime est un jeune garçon rejeté par la société, ce qui est arrivé à Harry quand il était enfant. Nous pouvions aussi utiliser cette affaire pour montrer comment Harry trouve un lien personnel avec les enquêtes qu’il mène, un lien qui allume un feu en lui et le rend acharné et téméraire. Echo Park nous donne une intrigue qui menace la communauté et donc une histoire avec de grands enjeux. Et puis, mes livres sont racontés du point de vue de Harry et il est donc de toutes les scènes. Nous ne pouvions faire travailler notre acteur, Titus Welliver, tous les jours et le mettre dans toutes les scènes. Il serait mort d’épuisement. Quand on suit le meurtrier Raynard Waits, Titus se repose avec un jour de congé. (Sourire)

On dit souvent que pour avoir un bon héros, il faut un bon méchant. C’est pour cela que vous avez choisi Raynard Waits comme premier adversaire de Harry Bosch ?

(Il secoue la tête) Je ne suis pas d’accord avec ce dicton. En tout cas, ce n’est pas vrai dans les livres. Personnellement, en tant qu’écrivain, je ne suis pas intéressé par les raisons qui poussent un criminel à agir. Je suis intéressé par Harry et par ce que son métier lui coûte. Dans beaucoup de mes livres, si ce n’est dans tous, vous ne savez même pas qui est le criminel tant que Harry ne l’a pas trouvé. Mais pour une série télé, cela aide d’en avoir un pour créer ce jeu du chat et de la souris.

Allez-vous utiliser vos livres pour la saison 2 ou créer des scénarios originaux ?

Mon contrat avec Amazon stipule que je dois utiliser mes livres pour les trois premières saisons. Après, je peux faire ce que je veux. Mais il y a déjà beaucoup d’éléments inventés pour la saison 1 même en utilisant mes livres. Dans la saison 2, nous allons adapter Le Cadavre dans la Rolls comme intrigue principale ainsi que Ceux qui tombent et Le Dernier Coyote mais dans une moindre mesure.

Allez-vous intégrer vos autres personnages au scénario comme dans vos livres quand vous faites travailler ensemble Harry Bosch et Michael Haller ?

Ce serait cool. Je rencontre les gens d’Amazon bientôt pour discuter de mes autres personnages comme ceux du Poète. J’aurais peut-être une autre série adaptée de mes autres livres. Mais ce serait amusant d’avoir Michael Haller dans une histoire de Bosch. (Sourire)

Ce n’est pas trop dur de partager la propriété de Harry Bosch maintenant que Titus Welliver l’incarne à l’écran ?

(Résigné) Harry ne m’appartient plus, Titus le possède désormais. Mes lecteurs vont maintenant le voir dans Harry. Par chance, cela ne parasite pas mon travail. Dans mes livres actuels, Harry a maintenant 64 ans. Titus est trop jeune pour que son image s’infiltre dans mes pensées quand j’écris de nouveaux livres.

Voir Clint Eastwood incarner Terry McCaleb dans Créance de sang et Matthew McConaughey jouer Michael Haller dans La Défense Lincoln vous a gêné pour écrire leurs autres aventures ?

J’avais peu écrit sur eux avant leur adaptation. Clint a totalement obscurcit l’image de Terry dans ma tête. Matthew… Il est tellement bon que je le vois maintenant quand j’écris les livres sur Michael Haller mais ça ne me gêne pas.

Article paru dans Studio Ciné Live – Hors-série n°29 – Avril 2015

 

 

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