Jusqu’à présent Jack O’Connell jouait les petits criminels : le skinhead de This is England, le cruel chef de bande d’Eden Lake, la tête brûlée de Skins, le délinquant endurci des Poings contre les murs… Dernièrement, il préfère les héros, face à l’IRA dans ’71 et aux Japonais de la Deuxième Guerre mondiale dans Unbroken.
D’où vient votre surnom « Jack the lad », « Jack la fripouille » ?
J’ai passé le plus clair de ma jeunesse à véhiculer une image de dur. C’était un prérequis là d’où je viens [Derby, en Angleterre]. J’ai donc une bonne idée de ce qu’est la bravade mais aussi du sentiment d’être un moins que rien et une ordure. Le théâtre a été ma porte de sortie. A l’école, c’était un cours obligatoire et gratuit. Je ne pouvais m’offrir une école de théâtre. Mon père était cheminot, ce qui me permettait d’aller aux auditions sans payer le train. J’en suis là aujourd’hui grâce à un faisceau de coïncidences. C’est là où Dieu intervient. (Il fait une pause) Ou un heureux hasard.
Pourquoi interprétez-vous autant de mauvais garçons à l’écran ?
Je récolte ce que j’ai semé. J’ai toujours été limité dans les personnages qu’on me proposait car je devais utiliser à mon avantage ce que les directeurs de casting attendaient de moi. J’ai donc commencé par jouer des jeunes en colère et violents. Mais j’étais différent des autres jeunes acteurs britanniques car pendant qu’ils apprenaient l’art dramatique dans une école, j’apprenais la vie et ça se sent dans mon travail. A 23 ans, j’ai le sentiment d’avoir vu ce que la vie a de mieux à offrir mais aussi ce qu’elle a de pire. Je me sens très mature. (Il pouffe de rire) Je suppose.
Angelina Jolie vous a choisi pour jouer Louis Zamperini, le champion olympique prisonnier des Japonais pendant la Deuxième Guerre mondiale dans Unbroken. Un homme à mille lieues de vous.
Angelina ne serait pas d’accord avec moi mais je ne suis pas Louis. Elle a vu des similarités entre nous deux mais il est d’une autre époque. Pour le jouer, j’ai adopté une autre façon de bouger et de parler. (Il réfléchit) Incarner un personnage qui existe réellement entraîne une telle responsabilité. C’est intimidant et la peur d’échouer me rend malade. Mais c’est aussi motivant. Je suis fier de ma filmographie. La seule chose que j’aimerais améliorer est sa diversité. Les gens qui me connaissent savent que j’en suis capable. J’aime prendre des risques et je sais où je veux aller maintenant. Je m’implique toujours à 100% dans tous les projets. Je crois au dur labeur. Mon père a rarement pris un jour de congé dans sa vie. Il est décédé en 2009. Il est mon inspiration. Je regrette qu’il ne puisse pas voir où j’en suis aujourd’hui.
La famille est-elle très importante pour vous ?
Je ne fais pas ce métier pour la célébrité mais pour que ma mère et ma sœur aient une belle vie. Et éventuellement moi aussi. Si j’atteins ce but, ce sera une récompense plus belle que toute la gloire du monde.
Article paru dans Azimut – Hiver 2014