Dans la série Chefs, il incarne un chef implacable qui mène sa brigade de cuistots à la baguette. Leur point commun : l’amour du travail bien fait.
Voyez-vous la cuisine différemment depuis que vous avez incarné un chef ?
Clovis Cornillac : Sûrement. Mais je n’en ai pas forcément conscience parce que j’aime beaucoup ça. J’avais monté un restaurant à Lyon [il s’est depuis retiré du Café Mademoiselle mais l’affaire continue, NDLR] parce que je suis un passionné de vins. Le vin m’a amené à développer le plaisir de la bouche. Mais ce que j’aime dans la cuisine, c’est l’idée d’être ensemble, de manger ensemble. L’idée du restaurant était fabuleuse. Tu crées un lieu où les gens travaillent, et j’adore la notion de travail, pour que d’autres gens puissent se retrouver et échanger. La table a quelque chose de super fort. Quand le scénario de Chefs est arrivé, il avait donc un écho particulier parce que ce sujet me touche.
Avez-vous des points communs avec votre personnage, Chef ?
Je ne m’identifie pas à lui mais je ne suis pas non plus son contraire. Je me rapproche de lui dans le côté forcené du travail, dans sa droiture et son engagement mais aussi dans son pouvoir de générer une forme d’enthousiasme avec une équipe. La grande différence est qu’émotionnellement, je n’ai pas sa trajectoire et que je suis dans un rapport plus facile avec les gens. C’est un personnage complexe. Il peut t’envoyer chier mais en même temps il est très rassurant car tu peux lui faire confiance. S’il dit qu’il va t’aider, il va le faire. Rien ne l’arrêtera. Savoir qu’il y a des gens qui s’engagent fait du bien dans la société actuelle. Chef est engagé, passionné. Après, il a plein de failles et beaucoup de choses à se reprocher.
Vous lui avez créé un passé pour le construire ?
Non, je ne crée jamais de passé pour mes personnages. Je trouve que ça ferme le sens de tout. Je me méfie de ce qu’on appelle la psychologie du personnage, je trouve cette expression très réductrice. Dans la vie, vous n’agissez jamais en suivant cette soit disant psychologie du personnage, vous ne faites jamais ce qui se fait dans un film. Je préfère rester libre et m’appuyer sur ses actes qui vont alors le définir. Cela me laisse une grande part de liberté et de possibilité dans mon jeu. Les auteurs ne sont pas non plus bloqués et tout est alors possible. C’est ce que montre la vie, tout est possible.
La preuve, vous venez de finir votre premier film, Un peu, beaucoup, aveuglément. Comment avez-vous vécu cette expérience ?
J’ai touché à une drogue dure. Un nouveau monde s’est ouvert à moi. J’adore le côté technique et puis c’est encore plus de travail, donc c’est bien. J’ai tout de suite été à l’aise mais j’ai quand même mis 30 ans à faire ce film. J’ai participé au scénario mais le grand kif a été dès que je suis entré en préparation : j’ai découvert à quel point j’étais impliqué partout et que tout ça avait du sens. Et encore maintenant, je suis au mixage et j’ai des trucs à dire, tout le temps. C’est une comédie romantique, une histoire d’amour entre deux personnes qui vont se rencontrer mais sans se voir. Donc, bonne chance !
Article paru dans Studio Ciné Live – N°66 – Février 2015
Crédit photo : © Christophe Charzat / FTV / CALT