Elle se partage depuis ses débuts, et avec autant d’aisance, entre le grand et le petit écran, qu’ils soient français ou anglo-saxons. Entre deux films, Clémence Poésy a retrouvé son personnage d’Elise dans Tunnel, dont la saison 2 commence le 7 mars sur Canal+. Sa flic torturée est très éloignée de ce qu’elle est dans la vie.
Sur son choix de devenir actrice
J’avais envie de raconter des histoires et être actrice me paraissait la façon la plus concrète, la plus physique de le faire. J’avais aussi envie de me raconter des histoires. Quand on est acteur, on se raconte beaucoup d’histoires tout seul sur son personnage, pour le construire. C’est d’ailleurs mon moment préféré, me poser des questions sur mon personnage. C’est quelque chose que je ne m’autorisais pas avant. Stephen Dillane [son partenaire de la série Tunnel] a beaucoup changé ma façon de travailler. C’est quelqu’un qui questionne beaucoup les choses. Il ne part pas dans une scène s’il n’a pas trouvé toutes les réponses. Aujourd’hui, je regarde une scène et j’essaye d’en comprendre toutes les nuances avant de me plonger dedans. J’ai appris de plein de gens mais beaucoup de Stephen. (Rires) Mais parce qu’on a travaillé ensemble pendant un an, deux fois six mois. On a travaillé ensemble avec dix réalisateurs différents, sans savoir ce qu’allait être le script des prochains épisodes, en essayant de comprendre ensemble ce qu’il se passait. Cela crée des liens.
Sur la réalité du métier d’actrice
Je savais que le métier était précaire mais pour moi, c’était un métier comme un autre car je grandissais avec. Je voyais aussi mon père [l’acteur et metteur en scène de théâtre Etienne Guichard] beaucoup s’amuser. Je le vois d’ailleurs toujours s’amuser. Je voyais aussi tous les autres côtés beaucoup moins simples de ce métier. Ma vision n’était ni abstraite ni idéalisée. Mais mon père avait beaucoup moins de copies à corriger le soir que ma mère [une prof de français]. Etre acteur semblait donc un peu plus rigolo. (Rires)
Sur les films qui ont marqué sa carrière
Gunpowder, treason & plot, un film pour la BBC où je joue Mary Stuart, a été la première fois où je me suis dit que j’avais ma place dans ce métier. La franchise Harry Potter a été un tournant dans ma carrière car tout à coup j’existais médiatiquement. Il était alors plus facile d’avoir accès à des rôles. Jeanne Captive a été essentiel. Pour la première fois, j’ai eu le sentiment de faire un film – et le même film – avec quelqu’un, en l’occurrence le réalisateur Philippe Ramos.
Sur ce qu’elle aurait aimé savoir plus tôt
Le droit d’avoir des secrets, de savoir des choses sur mon personnage que je n’avais pas à partager avec quelqu’un, de ne pas devoir tout faire valider par tout le monde. Il est intéressant de créer des mystères et de surprendre le réalisateur. Je ne me suis pas beaucoup autoriser cela au début. Mais au début, ce n’est pas grave car on a un côté chien fou, on se lance dans plein de trucs et on a envie d’une certaine autorité, d’un cadre. Une fois qu’on a acquis cela, il est possible de trouver sa propre liberté.
Sur sa première fois au théâtre, à New York
[Cyrano de Bergerac, en 2012] C’était la première fois que je faisais vraiment du théâtre. J’ai été admise au Conservatoire national supérieur d’art dramatique de Paris mais je n’ai pas pu y aller à cause du tournage de Harry Potter et la coupe de feu. J’ai toujours eu ce questionnement quant à ma validité au théâtre. Jouer au théâtre pour la première fois en anglais a été terrifiant. C’était aussi une charge de travail si importante que cela m’a donné de la force. Cela a aussi nourri mon personnage d’Elise car j’ai tourné Tunnel juste après. Le théâtre muscle, il donne de la force mais, de temps en temps, il faut s’en éloigner pour retrouver de la fragilité. Il donne du courage aussi.Sur son personnage d’Elise dans Tunnel 2
Elise traverse quelque chose d’intérieur et de brutal. Dans Tunnel 1, c’était le personnage de Steven qui faisait ce parcours-là. Trouver la justesse d’Elise a été compliqué : je devais garder qui elle était dans la saison 1 et en même temps faire surgir quelqu’un qu’elle avait oublié qu’elle était.
Sur l’amitié entre Elise et Karl, les personnages de Tunnel
Cette amitié homme/femme est ce que je préfère dans Tunnel. J’aime raconter que cette amitié est possible. Et égoïstement, c’est aussi une amitié que je vis avec Stephen.
Sur la réalité qui rattrape la fiction
[Dans Tunnel 2, Elise et Karl enquêtent sur un avion qui s’est abîmé en mer] Quand on a commencé à tourner dans le hangar, avec cet avion reconstitué, avec ces personnages qui ramassent des bouts de fuselage, on a appris qu’un avion s’était vraiment écrasé dans réalité. Le pilote a jeté son appareil sur une montagne. Tout à coup, la réalité est entrée dans la fiction. C’était troublant.Sur son escapade de chanteuse
Non, je ne suis pas chanteuse. J’ai chanté une fois, tout bas, sur la chanson d’un chanteur anglais [Miles Kane, sur sa chanson Happenstance] mais je ne suis pas chanteuse, ce n’est pas vrai.
Sur ses prochains rôles
Un de vos collègues m’a demandé si les grands rôles féminins étaient importants pour moi. Je lui ai dit que tant qu’on dirait « grands rôle féminins », ce sera important. On ne demande jamais à un acteur si son personnage est « un grand rôle masculin ». Les bons rôles ne sont pas faciles à trouver mais cette année j’ai l’impression d’avoir explorer plein de trucs différents. C’est plus cela qui m’intéresse : explorer des univers différents et ne pas me répéter.
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