A 22 ans, cette enfant de la balle – son père fait du théâtre – a déjà six ans de carrière derrière elle, au cinéma et à la télé. Parfaitement bilingue, Clémence Poésy joue indifféremment en français et en anglais, un petit plus qui lui a ouvert les portes de Harry Potter et la Coupe de feu.
Comment s’est passé le casting pour Fleur Delacour, votre personnage dans Harry Potter et la Coupe de feu ?
Clémence Poésy : Je travaillais sur un projet avec le directeur de casting Stéphane Foenkinos. Il s’occupait aussi de La Coupe de feu et il m’a demandé si cela m’intéressait. J’ai accepté sans y croire car je pensais être trop vieille. J’ai discuté en anglais avec lui devant une caméra et il a envoyé la cassette. Mike Newell est ensuite venu à Paris rencontrer quelques filles, dont moi. Nous avons parlé, puis j’ai travaillé une scène pour des essais à Londres. Et voilà.
Qu’est-ce que cela fait de jouer dans un Harry Potter ?
Je ne sais pas trop encore. J’ai juste fait mon boulot. J’étais sur le tournage, je travaillais dans des décors magiques, avec des moyens impressionnants et dans une ambiance très agréable. Cette façon de tourner est complètement différente de ce que j’ai pu connaître auparavant. Mais je ne sais pas trop encore. J’ai vu quelques extraits mais à un moment, ce n’est plus moi. C’est un personnage que toute une équipe a créé.
Etiez-vous fan de Harry Potter avant d’être choisie pour le rôle ?
J’avais lu les livres, que j’aime beaucoup, et j’avais vu le premier film. J’ai vu le troisième pendant le tournage, en DVD.
Comment avez-vous créé Fleur Delacour ?
Le but était surtout de lui trouver une allure, une façon de se tenir. Parce que, bon, elle ne raconte pas 40 000 trucs et ce n’est pas un personnage sur lequel vous vous prenez la tête avec de la psychologie. C’est quelqu’un avec qui vous vous amusez. Il faut trouver un look et une façon d’imposer cette image, en l’occurrence assez glacée, que nous avons déterminée avec le réalisateur.
Ce rôle est-il un défi pour vous ?
En fait, avant Harry Potter, j’ai joué un rôle absolument terrifiant. J’ai joué Mary Stuart dans un projet en anglais pour la BBC. A côté, Harry Potter, c’était des vacances. Parce que pour être honnête, au niveau jeu, je ne sais pas si c’est facile mais c’est plus aller s’amuser, aller rigoler pendant huit mois sur un truc d’une envergure absolument monstrueuse et complètement surréaliste. Ce n’est pas un défi mais je sentais que ce serait une expérience hors du commun.
Votre rôle est en anglais mais Mike Newell a dû vous demander d’accentuer votre accent français.
Un maximum. C’est un peu énervant. Mais là je viens de finir un film où j’ai un accent américain. Cela fait partie du jeu, de créer un archétype.
Où avez-vous appris l’anglais ?
A l’école. J’étais dans une école quasiment bilingue qui m’était l’accent sur l’anglais très tôt et avec des profs qui étaient anglais et américains et qui organisaient des échanges avec d’autres pays. J’ai donc passé deux mois au Canada quand j’avais 13 ans. Là, vous n’avez pas trop le choix. Et après j’ai continué à le pratiquer. Je ne sais pas si c’est incontournable aujourd’hui de parler anglais mais moi cela m’a permis de travailler pendant deux ans. Maintenant, j’aimerais bien faire un film en français. Mais ce qui est génial, c’est d’évoluer. Sur mon premier film en anglais, je n’avais pas de coach, j’avais des tartines de dialogues et je me suis rendue compte que j’arrivais à faire cela toute seule. Mais après ce qui est génial, c’est de rencontrer une coach. Sur Harry Potter, il y en a une tous les jours et avec qui je suis devenue très copine. Nous avons travaillé pas mal pendant mes périodes d’attente. Nous avons bossé sur l’accent pour qu’il soit bien français.
Comment est Mike Newell avec ses acteurs ?
Il a une attention permanente et une direction d’acteur précise. Il sait ce qu’il veut avec les personnages et l’histoire. C’est un gros jouet pour lui, il s’amuse. En tout cas, avec mon personnage qui est un archétype, nous avons plutôt rigolé. Mais quand l’histoire devient plus sombre, il m’a surprise car je ne m’attendais pas à être autant dirigée sur un film d’une telle envergure et avec autant d’effets spéciaux.
Avez-vous une scène préférée dans le film ?
Celle du labyrinthe. Nous l’avons tournée en quinze jours et c’était assez génial car nous étions paumés tous les trois [Daniel Radcliffe, Robert Pattison et elle] à courir dans tous les sens, à se mettre dans des états pas possibles parce que c’est vraiment chercher la peur alors qu’il n’y a rien. Enfin je crois que Mike voulait que nous explorions cela, les moments où vous avez très peur et où vous faites n’importe quoi. C’était assez rigolo à faire. Un peu crevant. Ce qui est génial sur un film comme cela, c’est que les décors sont tellement grandioses que vous n’avez pas l’impression d’être dans un décor. La Grande Salle est une grande salle, ce n’est pas juste quatre bouts de mur. Donc le labyrinthe est un vrai labyrinthe et nous sommes paumés. Et puis toutes les scènes sous l’eau étaient au moins à faire une fois dans sa vie. Vous vous retrouvez sous l’eau à enlever votre masque et votre truc d’air et vous allez à un autre point où quelqu’un vous rend votre truc d’air et votre masque. C’est horrible au début mais après c’est génial. Et il y a quelqu’un qui vous parle avec un micro : « Ai un peu plus peur. Regarde à gauche, à droite. » Cela donne envie de faire de la plongée sous-marine, mais pour voir des poissons et non un écran bleu. (Rires)
Comment était l’ambiance sur le tournage, comme une cour d’école ?
Non, parce que c’est vachement… C’est un tournage… C’est marrant, tout à l’heure quelqu’un me demandait si j’avais des anecdotes ou des trucs rigolos à raconter mais… C’est une ambiance très agréable mais c’est une ambiance de boulot. Nous faisons partie du processus mais à une toute petite échelle, pas comme vous pouvez l’être sur un tournage plus petit où vous avez l’impression de participer, d’être tous ensemble. Là, c’est très dispatché. Il y a des cases, tout le monde fait son boulot correctement dans une bonne humeur générale, il n’y a pas de pétage de plomb. Mais cela reste très pro. Mais ils sont obligés parce que quand 500 gamins arrivent tous les jours en costumes, ce n’est pas possible que ce soit une cour d’école. Il y a un chaperon tous les cinq enfants, c’est très réglementé. Ils sont obligés de faire très attention avec les lois sur le travail des enfants. Donc cela reste du boulot.
Avez-vous eu beaucoup de jours de tournage ?
Je suis restée sur le tournage quasiment pendant huit mois. Parce que tout prend énormément de temps. Vous pouvez être sur le tournage avec la première équipe pendant quelques jours, puis avec la seconde équipe. Vous pouvez être sur le tournage et ne pas tourner de toute la journée. Ce n’est pas huit mois continuellement car j’ai fait des allers et retours sur Paris, mais j’attendais pas mal. Le luxe de Harry Potter, c’est que quasiment tous les rôles ont une doublure donc vous n’êtes pas là pour les réglages des lumières. Mais finalement c’est bizarre parce que vous arrivez sur le plateau pour faire votre truc et une fois fini, vous repartez. Vous êtes beaucoup dans votre loge. Vous n’êtes pas si souvent que cela sur le plateau et vous ne voyez pas tellement les choses en train de se faire. C’est assez étrange. Vous êtes vraiment là pour faire votre boulot donc du coup, moi j’ai passé beaucoup de temps à lire. Stéphane Foenkinos m’a dit : « Tu vas apprendre à faire du tricot. » Quand je suis rentrée, il m’a dit : « Alors, tu m’as fait mon écharpe ? » (Rires)
Hors tournage, étiez-vous comme une grande sœur pour Daniel Radcliffe, Rupert Grint et Emma Watson ?
Tu parles, j’étais la grand-mère ! (Rires) Mais ce qui était marrant au début, c’est qu’on me disait : « Mais tu es venue sans ta maman ? » (Rires) Et puis, ils ont appris que j’avais 22 ans. Sinon, cela s’est bien passé avec les autres acteurs. Mike voulait que nous nous connaissions tous avant le tournage car nous avons beaucoup de scènes de groupe et il y a cette compétition entre les personnages. Il voulait que nous ayons ce rapport entre nous. Nous avons donc eu deux petites séances de travail, tranquillou, pour apprendre à se connaître. Ce sont des acteurs adorables, super mûrs, avec qui il est possible de parler de plein de trucs. Et puis, ils n’ont rien à prouver.
Contrairement à vous ?
Moi ? Mais j’ai tout à prouver ! Grâce à Harry Potter, j’ai accès à certains projets mais j’ai tout à prouver parce que ce n’est pas dans Harry Potter que vous verrez… Je ne sais pas ce que vous pourrez y voir, mais j’ai tout à prouver.
La question qui vous a été le plus posée pendant cette promotion ?
« Est-ce que vous étiez fan de Harry Potter avant d’être choisie pour le rôle ? »
Je l’ai.
(Elle éclate de rire)
Crédit photos : ©Warner Bros
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